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Saint-Médard (Paris Ve) – Concert inaugural pour le retour du Chemin de Croix restauré

Le retour des 14 stations dans l’église Saint-Médard (Paris Ve), restaurées grâce aux donateurs des Chantiers du Cardinal, a été célébré par un concert le 22 mars 2025 réunissant paroissiens et invités.

Concert inaugural dans le choeur de l'église Saint Medard

Concert inaugural à Saint-Médard (Paris Ve) pour le retour du chemin de croix restauré

Dans un précédent article, on a expliqué pourquoi la restauration avait été plus longue que prévu mais l’essentiel était que les stations reviennent avant la Semaine Sainte. C’est chose faite. Certes l’opération n’est pas totalement achevée puisque les éclairages restent encore à installer à la base de chaque station. Le changement, à la simple lumière naturelle provenant des vitraux, est néanmoins d’ores et déjà saisissant. Les paroissiens présents, habitués de l’église, reconnaissent à peine les œuvres. Compte tenu de la différence entre l’avant et l’après restauration, l’un, avant l’inauguration proprement dite, n’hésite pas à comparer l’opération à la restauration de la chapelle Sixtine. Un autre, qui connaît bien le rôle des Chantiers du Cardinal et cite certaines de ses opérations en banlieue, juge les stations « très parlantes » ; elles touchent « directement » ceux qui les regardent ; « elles vont à l’essentiel ». Une dame est éblouie par leur « lumière » – lumière qu’elle ne soupçonnait pas – et leur « simplicité comme [leur] évidence ». Elle ajoute qu’on est loin de nombre de Chemins de Croix qui ont envahi certaines églises de province, sur le même modèle et souvent d’esprit saint-sulpicien, totalement passé de mode.

Station restaurée du chemin de croix, accrochée dans l'église Saint Médard

Une station restaurée du chemin de croix, de retour dans l’église

Le Père Albert Gambart, curé de la paroisse, initie l’inauguration et prend la parole pour se féliciter du retour des stations et remercier les Chantiers du Cardinal, le Pèlerin magazine, Caroline Morizot de la Commission d’art sacré de l’Association Diocésaine de Paris et responsable de la conservation et de l’inventaire, ainsi que Julie Chanut, restauratrice, pour avoir permis la réinstallation des œuvres et la découverte de leur splendeur.

L’organiste Jean Galard présente ensuite son œuvre Cœur adorable inspiré par des ex-voto de cœurs entrelacés et un texte empreint de piété et consacré au Sacré-cœur de Jésus écrit par Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI, en 1790. La pièce, assez courte et ornant un écrit d’une langue d’une grande clarté et propice à sa mise en musique, est interprétée par Cécile Bellon, soprano, le compositeur étant aux claviers de l’orgue de chœur. Qualifiée d’ouverture, elle convient fort bien par sa simplicité et son style, assez proche finalement de celui de Gabriel Fauré, à l’esprit qui animait les trois artistes peintres autrices des stations.

Cécile Bellon, soprano

Cécile Bellon, soprano

Le directeur général bénévole des Chantiers du Cardinal, Jean-Pierre Gaspard, prend la parole pour se féliciter que le retour en mars du Chemin de Croix corresponde au début de la période du Carême et peu de temps après la Journée internationale des droits des femmes, se plaisant à rappeler que le Chemin de Croix de l’église Saint-Médard a été réalisé par trois femmes du mouvement des Ateliers d’art sacré dans les années 1930, Marthe Flandrin, Simone Flandrin-Latron et Simone Lorimy-Delarozière. Il tient à remercier chaleureusement tous les donateurs qui ont permis la restauration des stations et rappelle le rôle éminent et historique des Chantiers du Cardinal dans la restauration du patrimoine religieux dans l’ensemble des diocèses d’Île-de-France.

Caroline Morizot prolonge ces propos en racontant l’origine de la restauration : un signalement à la Commission d’art sacré de tout l’intérêt des stations malgré leur apparence sinistre, leur « camaïeu marronnasse ». Elle décrit une dépose délicate et « pas toujours agréable » en raison de la poussière et même de la présence d’araignées puis replace les artistes dans le contexte de renouveau de l’art sacré des années Trente, sans qu’on sache cependant vraiment les circonstances de la commande. Elle invite les personnes présentes à bien observer la sobriété des scènes, soulignant notamment la simplicité des vêtements, leur représentation étant marquée par un certain retour à l’antique. Le Chemin de Croix de l’église du Saint-Esprit à Paris (XIIe arrondissement) de Georges Desvallières n’est pas très éloigné par son approche du thème de la Passion mais il y a, somme toute, peu de Chemins de Croix comme celui-ci à Paris.

De gauche à droite : Caroline Morizot, Commissions Diocésaine d’Art Sacré, Jean-Pierre Gaspard, directeur général bénévole des Chantiers du Cardinal, et Julie Chanut, restauratrice

La restauratrice, Julie Chanut, fait ensuite part de la joie qu’elle a eu à restaurer les œuvres. Leur état était très médiocre mais le résultat de la restauration est enthousiasmant. Les vernis avaient jauni, la saleté s’était accumulée, des craquelures étaient apparues, probablement rapidement après la peinture des œuvres, et la fumée des cierges avait fini par coller. La restauration a permis une véritable renaissance des couleurs initiales et de remettre en valeur la modernité des scènes. On reconnaît la patte différente des trois artistes qui se sont partagées équitablement les stations, signées et parfois datées, mais la communauté de vue et d’inspiration est étonnante. Les peintres n’ont nullement voulu « mettre à distance le spectateur ». Les nettoyages opérés et les mesures conservatoires appliquées ont donné une nouvelle vie à leur œuvre collective exceptionnelle.

Affiche du concert pour l'inauguration et le retour des stations restaurées

Affiche du concert pour l’inauguration et le retour des stations restaurées

Ensuite, est interprété par les douze chanteurs de l’ensemble choral de la paroisse sous la direction de Dong-Jun Kim, avec Jean Galard à l’orgue, le Via Crucis (1879) de Franz Liszt, une œuvre tardive, de la période mystique, du compositeur, marquée par des chromatismes vertigineux mais aussi par une économie de moyens seyant fort bien au Chemin de Croix inauguré. Les quatorze stations sont annoncées, sur un signe de la main d’un des chanteurs, par un paroissien, Jean-Pierre Péry, tandis que les peintures restaurées correspondantes sont successivement projetées sur un grand écran. On ne peut qu’être saisi par la profondeur de l’œuvre. Les interventions du baryton Laurent Beligné dans la deuxième station – Jésus prend la croix sur ses épaules – ou la douzième – Jésus expire sur la croix -, après la brève et terrible onzième consacrée à la mort du Christ, sont particulièrement impressionnantes. L’hommage à Bach transparaît dans le choral de la sixième – Sainte Véronique essuie le visage de Jésus – et le final revient sur le Vexilla Regis de l’introduction pendant qu’est montrée la dernière station représentant la mise au tombeau, sur un fond de roches rapidement brossé, percé d’un trou béant. Avant les applaudissements, c’est un silence fait d’émotion et de respect qui accueille l’interprétation de cette œuvre trop rarement à l’affiche.

L’événement se poursuit par l’annonce par Charles Gazeau, paroissien, des prochaines étapes liées au programme de restauration d’autres œuvres présentes dans l’église, jusqu’aux Journées Européennes du Patrimoine en septembre 2025, et un nouvel appel aux dons puis un pot de l’amitié. Décidément une belle journée pour la paroisse. Grâce aux Chantiers du Cardinal.

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