Les stations dans l’atelier de restauration en attente d’une nouvelle vie. Certaines ont perdu leur croix sommitale © Stéphane Guy
Certains cadres ont tout d’abord été retirés pour mesurer les pathologies et choisir les méthodes de restauration. L’opération a permis de confirmer qu’il s’agissait bien de peintures à l’huile réalisées à la brosse large sur des panneaux de contreplaqué, après découpe, et de constater que la couche de crasse, épaisse et noirâtre, nuisait considérablement à la lisibilité des œuvres : la restauration était donc bien justifiée.
S’agissant des revers métalliques, ils sont constitués de feuilles de plomb clouées sur les cadres. Elles ont subi quelques dépôts et corrosions. Bien qu’étant altérées, elles n’ont pas porté préjudice aux œuvres, un badigeon ayant été de surcroît étalé au verso des panneaux. Il est possible que ces feuilles de plomb aient protégé les œuvres de l’humidité provenant des murs sur lesquels étaient accrochés les tableaux du Chemin de Croix.
Les peintures en observation avant traitement
Chaque tableau des station du Chemin de Croix est signé et certains sont datés. Après l’analyse des supports et des pathologies des peintures, il a été décidé de poursuivre les décrassages en raison de la forte présence de suies et de cires de bougie mêlées à la saleté. Ensuite, il a fallu retirer les fines couches de vernis à base de résines naturelles qui avaient fortement jauni. Les craquelures apparues lors du séchage des œuvres vont être comblées par des repiquages pour retrouver l’harmonie de certaines couleurs. Quelques bordures, dans les feuillures des cadres, devraient aussi être refixées, les panneaux y étant vissés. Ceci permettra de respecter les règles de l’art de cette restauration.
Premiers essais de nettoyage © Julie Chanut
Sera ensuite appliquée une nouvelle couche de vernis protectrice, très fine, « pas trop brillante pour éviter les reflets. Ceci afin d’obtenir une grande saturation des couleurs, » explique Julie Chanut. Au total, la restauratrice espère une récupération significative de contrastes et de profondeurs et une révélation des couleurs initiales. Toujours enthousiaste, elle fait remarquer la qualité des compositions, leurs volumes simples, l’unité stylistique des stations alors que trois artistes sont intervenues, et la présence de vêtements plutôt contemporains dans la présentation de certains personnages, comme cela se faisait jadis.
La station de Jésus devant Ponce Pilate, après dépoussiérage et retrait du premier vernis jauni par l’oxydation (sauf sur les deux témoins). © Stéphane Guy
Observation et traitement des cadres
Parallèlement au traitement des peintures, Julie Chanut va aussi traiter les cadres. Dépoussiérage et décrassage, retrait de dépôts de cire de bougie, effacement des ruissellements calcaires et des salissures d’insectes, le tout étant complété par un passage d’huile de lin.
Enfin, les plaques de plomb vont subir un décrassage et un ponçage fin, selon un protocole antiplomb spécifique pour éviter tout risque de saturnisme. L’opération devrait être complétée par l’insertion d’un film de polyester (melinex) pour assurer une bonne isolation des plaques par rapport aux panneaux.
L’ensemble de ce travail est, on le voit, finalement plus important que prévu, il faut en effet plusieurs jours de restauration par station. La repose du Chemin de Croix devrait donc pouvoir se faire pour la Toussaint 2024. A cette occasion, il est prévu de valoriser chaque tableau des stations par un nouvel éclairage. Il sera peu rasant, moins jaune et plus économique que le précédent, comme prévu au budget.
Ainsi, ce chemin de croix va connaître une nouvelle vie et une réelle mise en valeur qui va permettre de mieux révéler cette œuvre unique de trois peintres femmes exceptionnelles.
Stéphane Guy