Maurice Denis, le moine-peintre
Maurice Denis souhaitait « mettre de la beauté partout », et en particulier dans les églises pour porter la prière. Fabienne Stahl, docteur en histoire de l’art et Chargée de la valorisation et du rayonnement des collections du musée Maurice-Denis revient sur le double déclic qui a déterminé la carrière de l’artiste, son œuvre de peintre et de peintre-verrier ainsi que sur ses engagements.
Fermé depuis plusieurs années, le musée, situé dans son ancienne maison « Le Prieuré » à Saint-Germain-en-Laye, doit rouvrir ses portes à l’automne 2021 avec une exposition intitulée « Maurice Denis, bonheur rêvé ». L’occasion de s’immerger dans la vie intime de l’homme en suivant l’évolution de son œuvre.
Toute la vie de Maurice Denis (1870-1943), peintre, peintre-verrier mais aussi écrivain et photographe, a été guidée par cette volonté de partager sa foi. Quand lui est venue cette vocation ?
Dès son plus jeune âge, Maurice Denis était très pieux mais Fra Angelico a été le déclic de cette vocation ou plus exactement c’est un double déclic qui en est à l’origine. Quand il a treize ans, il trouve à la bibliothèque de Saint-Germain-en-Laye (où il a toujours vécu) un fascicule sur la vie de ce moine peintre. Deux ans plus tard, il rencontre, par hasard dans le train qui le conduit vers Paris, un peintre amateur qui l’emmène au Louvre. C’est la première fois qu’il se rend dans le musée et il est complètement bouleversé par Le Couronnement de la Vierge de Fra Angelico. C’est à ce moment-là qu’il décide qu’il sera, lui aussi, « moine-peintre ».
Mais le destin en décide autrement. À 20 ans, il tombe amoureux d’une jeune fille, Marthe Meurier. Elle va devenir sa muse, son modèle de prédiction, son alter ego. Maurice Denis se contentera donc d’être peintre chrétien et de dédier son œuvre à Dieu !
Comment Maurice Denis a-t-il été amené à réaliser le décor de l’église Saint-Louis de Vincennes ?
C’est grâce à une commande posthume d’un de ses amis, l’abbé Marraud. Ce séminariste du début du XXe siècle avait écrit un petit livre qui s’appelait « Imagerie religieuse et art populaire ». Il était convaincu que l’Église se devait d’être un lieu de rencontre, un lieu de contemplation de la beauté et s’inquiétait que les ouvriers, les gens des campagnes, avaient trop peu d’occasions d’admirer des œuvres artistiques. Avant de partir à la guerre, il avait donc rédigé son testament où il stipulait qu’il souhaitait donner une grosse somme d’argent (20 000 francs de l’époque) pour que Maurice Denis réalise un décor dans une église parisienne. Il a trouvé la mort en 1916 et c’est Saint-Louis de Vincennes qui en a bénéficié. L’artiste y a d’ailleurs fait figurer son portrait.
C’est d’autant plus intéressant que dans cet opuscule, paru en 1913, l’abbé Marraud écrivait que pour rénover l’art sacré, il faudrait que soit créée une école où on formerait des peintres chrétiens. Maurice Denis a répondu à ce souhait en fondant en 1919 avec Georges Desvallières les Ateliers d’art sacré.
[VOIR] Le projet de restauration de l’église Saint-Louis à Vincennes